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CÔTÉ COUR

Communication incomplète du dossier du Directeur des poursuites criminelles et pénales à un accusé – Responsabilité civile de procureurs de la Couronne – Procureurs de la Couronne qui retiennent sciemment un élément de preuve pertinent dans le contexte d’une accusation criminelle.

Roy c. Québec (Procureure générale), [2016] QCCS 5475

Le demandeur fut accusé d’avoir conduit en état d’ébriété et d’avoir dépassé la limite légale d’alcool permise. Les accusations criminelles ont été portées moins de deux mois après les faits, mais un arrêt des procédures est prononcé quatre ans après la mise en accusation. Il intente alors une poursuite en dommages et intérêts contre la Ville (pour le travail de ses policiers), la Procureure générale du Québec et les deux procureurs de la couronne au dossier. Le présent jugement porte sur la communication de certains documents, que cherche à obtenir le procureur du demandeur dans le cadre de l’interrogatoire des deux procureurs de la couronne ainsi que du représentant de la Procureure générale du Québec, à laquelle les défendeurs s’opposent.

 

Faits pertinents

Jean-François Roy (« Roy ») est accusé d’avoir conduit en état d’ébriété et d’avoir dépassé la limite légale d’alcool permise le 29 septembre 2010. Les accusations criminelles sont portées le 5 novembre 2010, mais un arrêt des procédures est prononcé quatre ans après la mise en accusation, pour deux motifs. D’abord, le droit constitutionnel d’être jugé dans un délai raisonnable avait été enfreint. Ensuite, la Procureure générale du Québec (« PGQ »)  avait communiqué au demandeur de manière tardive un élément de preuve important, c’est-à-dire le fait que la technicienne ayant procédé au test d’alcoolémie le 29 septembre 2010 avait échoué un test de requalification deux mois plus tard.

Dans le cadre de l’interrogatoire des deux procureurs de la couronne ainsi que du représentant de la PGQ, la procureure de Roy demande la communication  du dossier complet du Directeur des poursuites criminelles et pénales (« DPCP »), incluant notamment les échanges de correspondance, les notes évolutives, les mémos, les feuilles de temps, les notes d’intervention, les échanges de correspondances ou tout autre document traitant de l’information quant à l’échec par la technicienne de ses tests de requalification.

Le procureur des défendeurs accepte de fournir la correspondance entre la Ville de Québec et le DPCP et tout autre document traitant de l’information de l’échec par la technicienne de ses tests de requalification, mais il refuse de communiquer le reste des documents demandés, qualifiant cette demande d’expédition de pêche visant des documents privilégiés et confidentiels, en plus d’être non pertinents au litige.

Analyse  et décision de la Cour

Tout d’abord, la cour rappelle qu’une demande de communication de documents vague et générale doit être justifiée par des motifs précis.

La Cour réitère qu’une liste rédigée de façon générale et globale constitue une partie de pêche et qu’une fouille exhaustive dans les documents de la partie adverse dans le but de bonifier sa cause, d’étayer ses prétentions ou de mettre la main sur une simple source de renseignements additionnels ne saurait être cautionnée par la Cour. Elle fait référence à ce principe tel que décrit dans les arrêts Blaikie c. Commission des valeurs mobilières du Québec, Commercial union Assurance Co. Of Canada c. Nacan Products Ltd. et Lalande c. Compagnie d’arrimage de Québec ltée, ainsi que la doctrine du Précis de procédure civile.

La procureure du demandeur invoquait comme motif que cette demande de documents était justifiée du fait qu’elle voulait contrôler la véracité de certaines allégations de la défense écrite, comme par exemple celle selon laquelle Me Champoux aurait été informé de la non qualification de madame Chassé à une certaine date. La cour constate que cette affirmation peut être vérifiée autrement, par exemple en interrogeant sous serment Me Champoux et que de toute façon, si elle doute de cette affirmation de manière catégorique, c’est qu’elle a une preuve contraire qu’elle devrait produire.

La Cour conclut que la démonstration n’a pas été faite que des motifs précis justifiaient la demande de communication de documents, telle que formulée, la qualifiant de « trop vague et générale ». Toutefois, la cour souligne que cela n’empêche pas la procureure du demandeur de produire une nouvelle demande de communication de documents plus précise, et qui respecte les critères établis par la jurisprudence mentionnée précédemment.

 

14 Fév, 17

 

 

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