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CÔTÉ COUR

Défaut d’une municipalité d’ouvrir une voie de circulation contrairement à ses engagements à une entrepreneur en construction – Obligation de l’assureur de la municipalité de prendre fait et cause – Nature véritable de la réclamation contre la municipalité – La terminologie employée dans les actes de procédure n’est pas déterminante

9173-1521 Québec inc. c. Municipalité de Saint-Georges-de-Clarenceville, 2017 QCCS 4399

Dans le cadre du litige entre 9173-1521 Québec inc. (ci-après : « demanderesse ») et  la municipalité de Saint-Georges-de-Clarenceville (ci-après : « municipalité »), cette dernière demande que soit ordonné à La Mutuelle des municipalités du Québec (ci-après : « MMQ »), son assureur responsabilité civile, de prendre fait et cause pour elle et d’assumer sa défense. Elle demande également le remboursement des frais payés aux fins de sa défense.

Les questions en litige sont les suivantes :

  1. MMQ a-t-elle l’obligation d’assumer partiellement ou en totalité la défense de la municipalité?
  2. Dans l’éventualité d’une obligation partielle, MMQ doit-elle prendre en charge les frais de défense incluant ceux sur la partie non-couverte?

Les faits

La demanderesse œuvre dans le domaine immobilier. Elle acquiert des terrains situés sur le territoire de la municipalité afin d’y faire du développement résidentiel. Initialement, il est prévu que M. Cohen (ci-après : « mis en cause ») cède à la municipalité la voie de circulation desservant lesdits terrains au prix d’un dollar. Ce dernier refuse ultimement d’honorer ses engagements. La demanderesse, dans l’impossibilité de vendre ses terrains et d’y mener à terme son projet, se retourne contre la municipalité. Elle prétend que cette dernière est devenue propriétaire de la voie de circulation par dédicace et demande un jugement déclaratoire à cet effet. De surcroît, elle réclame les pertes pécuniaires liées au défaut de la municipalité de prendre les moyens nécessaires aux fins d’acquisition de la voie. La municipalité fait une réclamation à MMQ, laquelle refuse de prend fait et cause pour elle. Elle prétend que la réclamation n’est pas couverte par la police au motif que la demande est basée sur le défaut de la municipalité de procéder à l’expropriation. Selon ce contexte, il s’agit d’une décision de nature politique et discrétionnaire qui ne fait l’objet d’aucune couverture d’assurance. La municipalité demande alors au tribunal d’ordonner MMQ d’assumer sa défense.

Analyse et décision de la Cour

L’obligation de défendre (art. 2503 C.c.Q) s’évalue à la lumière des procédures judiciaires. Il est impératif de caractériser la demande en justice au vu de son contenu véritable afin de déterminer si elle relève de la police. Les parties ne sont toutefois pas liées par la terminologie employée auxdites procédures.  L’obligation de défendre nait dès lors qu’il existe la simple possibilité que la demande soit visée par la police. Il revient donc à la municipalité d’établir la possibilité que la demande soit couverte par sa police auprès de MMQ. Pour se faire, il faut que la réclamation corresponde à la définition de « dommages-intérêts compensatoires » ou qu’elle soit visée par la garantie « erreurs et omissions » tel que prévu à la police.

À l’égard de la portion de la réclamation portant sur la dédicace, le tribunal donne raison à MMQ. Il s’agit d’une demande de nature déclaratoire, laquelle ne correspond pas à la définition de « dommages-intérêts compensatoires ». Relativement aux pertes pécuniaires réclamées en raison de la négligence alléguée de la municipalité d’acquérir la voie de circulation, le tribunal est d’avis qu’il s’agit d’une demande basée sur le manquement de la municipalité à ses obligations contractuelles. Contrairement aux arguments de MMQ, il ne s’agit pas d’une réclamation fondée sur un défaut de procéder à l’expropriation, qui serait de nature politique, mais plutôt sur le non-respect d’engagements. Bien que certains allégués fassent référence à l’expropriation, la nature véritable du recours demeure contractuelle. Les actes reprochés à la municipalité constituent donc des actes fautifs au sens de la police. Le tribunal ordonne à MMQ de prendre fait et cause et d’assumer la défense de la municipalité pour la portion de la réclamation portant sur les dommages-intérêts uniquement.

Quant à la prétention de la municipalité selon laquelle MMQ a l’obligation de lui rembourser l’intégralité de ses frais de défense malgré une couverture partielle de la protection d’assurance, le tribunal n’y adhère pas. Le principe veut plutôt  que l’obligation de défense de l’assureur se limite à la portion de la réclamation couverte par la police. En l’espèce, l’obligation de MMQ d’assumer la défense de la municipalité est restreinte à la portion dommages-intérêts de la demande.

28 Mar, 18

 

 

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