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CÔTÉ COUR

La preuve par filature : une arme à double tranchant!

Dans le cadre d’une action en réclamation d’indemnités d’assurance-invalidité, un assureur a été condamné à indemniser son assuré et a vu sa preuve de filature exclue du dossier au motif que celle-ci avait été obtenue en contravention du droit au respect de la vie privée de celui-ci[1]. En effet, il a été jugé que l’assureur ne possédait pas de motifs raisonnables justifiant la surveillance et que ceux-ci ne pouvaient être créés a posteriori.

Fort de ce jugement, l’assuré a ensuite intenté une action distincte réclamant à son assureur des dommages moraux et punitifs pour atteinte à ses droits protégés par la Charte. Après un examen attentif de la preuve, le juge saisi du dossier a conclu que la troisième filature effectuée par l’assureur constituait une atteinte illicite et intentionnelle à un droit protégé par la Charte puisque celle-ci avait été effectuée après le jugement qui avait exclue la preuve obtenue lors de deux premières surveillances. L’assureur a été condamné à verser à son assuré des dommages punitifs de 25,000$[2].

En appel, la Cour a maintenu pour l’essentiel le jugement de première instance[3]. Toutefois, contrairement à ce qu’a conclu le premier juge, il a été décidé que la deuxième surveillance effectuée par l’assureur, après un jugement interlocutoire lui ayant interdit de procéder à un nouvel interrogatoire et à une expertise médicale additionnelle de l’assuré, constituait également une atteinte intentionnelle au droit à la vie privée de l’assuré, de sorte que 25,000$ lui fut accordé.

Quant à la troisième surveillance effectuée au mépris du jugement ayant exclu la preuve par filature antérieure, la Cour d’appel est d’avis que la faute est d’une gravité telle que les dommages octroyés par le juge de première instance sont largement insuffisants. La Cour note à cet égard que la somme de 25,000$ octroyée par le premier juge représente à peine 0,0008% de l’actif de l’assureur. Un montant additionnel de 100,000$ est donc accordé à l’assuré.

Bien que cette affaire s’inscrive dans un contexte factuel particulier et que l’assureur ait fait montre d’un manque de respect flagrant face aux ordonnances de la Cour, il faut y voir un message clair de la Cour d’appel de ne plus tolérer des comportements abusifs de la part d’assureurs faisant épier systématiquement et répétitivement leurs assurés, sans motifs raisonnables.

20 Mar, 15

 

 

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