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CÔTÉ COUR

Lorsque le temps fait perdre des droits! – Prescription – Suspension – Interruption –  Des discussions téléphoniques peuvent-elles interrompre la prescription?

Abdulla Saad Sareeh Trading Est c. SNC-Lavalin International Inc., 2019 QCCS 96.

Le présent litige oppose Abdulla Saad Sareeh Trading Est (ci-après : « la demanderesse» ou « ASSTE ») et SNC-Lavallin International Inc. (ci-après : « la défenderesse » ou « SNC »). Les principales questions à trancher sont celles de savoir si le recours est prescrit ou s’il y a eu une interruption ou une suspension de la prescription comme le prétend ASSTE.

Les faits

Depuis 1995, SNC et ASSTE avaient développé une solide relation d’affaires puisque la demanderesse représentait et assistait SNC pour percer dans le marché saoudien et pour obtenir certains contrats importants. Le 28 octobre 2009, les parties ont conclu une entente selon laquelle ASSTE assisterait et représenterait SNC dans le cadre de l’obtention d’un contrat avec une autre société. Cette entente prévoyait que SNC verserait à ASSTE une somme de deux millions de dollars américains en deux versements d’un million de dollars. Le premier versement était dû le 30 novembre 2009 et le second le 31 mai 2010. Seul le premier versement fut payé par la défenderesse.

Au départ, monsieur Al-Tamimi, le représentant de la demanderesse, ne s’inquiétait pas trop relativement au retard de paiement. Ce n’est qu’en 2010 qu’il entra en communication avec monsieur Beaudoin, représentant de la défenderesse, pour s’enquérir du paiement. Ce dernier lui répondit alors qu’il effectuerait le suivi nécessaire.

D’autres correspondances suivirent en 2012 et 2013 concernant ledit paiement du deuxième versement. En 2013, monsieur Al-Tamimi consulta un avocat à ce sujet. Le 18 septembre 2014, n’ayant pu obtenir de réponse satisfaisante, ASSTE envoya à SNC une lettre concernant le paiement du deuxième versement dû. À ce moment, SNC répondit qu’il n’y aurait pas de paiement de leur part puisque l’entente avait été résiliée en 2012 et que la réclamation d’ASSTE était prescrite.

C’est en décembre 2015 qu’ASSTE introduisit les procédures légales.

Analyse et décision de la Cour

La demanderesse soutient que le délai de prescription de trois ans prévu au Code civil du Québec fut interrompu à plusieurs reprises entre 2010 et 2012 et fut suspendu définitivement à compter du mois d’avril 2012. De son côté, la défenderesse soutient que le délai de prescription de trois ans a débuté le 1er juin 2010 et que le recours est donc prescrit. Dans l’éventualité où le délai de prescription aurait commencé à courir le 26 avril 2012, la défenderesse rappelle que le recours serait néanmoins prescrit.

Le tribunal rappelle qu’une fois le délai de prescription de trois ans atteint, le fardeau de prouver l’interruption ou la suspension du délai de prescription repose sur les épaules de la partie qui l’invoque. En l’espèce, ce fardeau reposait donc sur les épaules d’ASSTE.

L’honorable juge Micheline Perrault s’appuie sur une jurisprudence constante pour conclure qu’une reconnaissance de dette doit être claire et sans équivoque pour interrompre la prescription.

La Cour conclut qu’il n’y a pas eu d’interruption ou de suspension de prescription dans ce cas. Les conversations téléphoniques avec divers employés de SNC ainsi que les conversations avec monsieur Beaudoin ne sont pas suffisantes pour conclure à une interruption ou à une suspension du délai de prescription. Dans ces conversations, on mentionne à monsieur Al-Tamimi que le suivi nécessaire sera effectué. Cela ne peut pas constituer une renonciation, une interruption ou une suspension du délai de prescription.

La prétention de la demanderesse selon laquelle monsieur Beaudoin a volontairement induit en erreur monsieur Al-Tamimi n’est pas retenue.

Le recours de la demanderesse est donc rejeté.

14 Mai, 19

 

 

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