menu

CÔTÉ COUR

Assurance automobile – Préjudice corporel aggravé ou distinct suite aux fautes subséquentes de tiers – Régime d’indemnisation sans égard à la faute – Possibilité d’intenter un recours civil?

Godbout c. Pagé, [2017] CSC 18

La Cour doit déterminer si une personne blessée dans un accident automobile, dont l’état s’aggrave en raison de la faute subséquente d’un tiers, peut intenter un recours en responsabilité civile contre le fautif.

Les faits

Le 10 janvier 1999, Mme Thérèse Godbout (« Godbout ») subit des fractures multiples aux deux jambes lors d’un accident automobile. En raison de fautes commises par le personnel médical, Godbout est obligée de se faire amputer les jambes.

Le 18 octobre 2009, M. Gilles Gargantiel (« Gargantiel ») perd le contrôle de son véhicule et se retrouve inconscient dans un fossé. Malgré la communication des coordonnées GPS du véhicule à la Sûreté du Québec par l’entreprise OnStar, Gargantiel est retrouvé plus de 40 heures après l’accident. Gargantiel reproche aux policiers d’avoir été négligents en abandonnant hâtivement les recherches. Il a été retrouvé en état d’hypothermie grave avec des engelures, dont les séquelles ont mené à l’amputation de sa jambe droite.

Godbout et Gargantiel désirent poursuivre les fautifs en mettant de l’avant la source distincte de leur préjudice. Ils soutiennent que leur préjudice corporel n’est pas « causé par une automobile », mais bien par la faute subséquente de tiers.

En 2015, Godbout et Gargantiel ont tous deux obtenu des jugements défavorables en Cour d’appel. Les deux pourvois ont donc été réunis en Cour suprême puisqu’ils visaient exactement les mêmes questions juridiques.

Analyse et décision de la Cour

La Cour concède que la Loi sur l’assurance automobile présente des difficultés d’interprétation. En effet, l’utilisation de l’expression « causé dans un accident » pour qualifier le préjudice corporel évoque les notions de responsabilité civile prévues au Code civil du Québec.

Or, la Loi sur l’assurance automobile a été adoptée avec une intention bien différente et doit donc être interprétée avec celle-ci en tête. Le but du législateur était d’implanter un régime sans égard à la responsabilité qui indemniserait en intégralité toute personne qui subit un préjudice corporel en lien avec une automobile.

Pour atteindre cet objectif, il fallait permettre à la victime d’éviter des procédures judiciaires onéreuses et incertaines. Puisque le régime mis en place dit indemniser en entier le préjudice corporel, tout recours civil à cet égard est interdit.

Dans ce contexte, la Cour explique qu’il suffira d’établir l’existence d’un lien plausible, logique et suffisamment étroit entre le préjudice et l’accident. Dès que ce lien existe, l’ensemble du préjudice sera couvert par la Loi sur l’assurance automobile et ce, même si une partie découle d’événements subséquents à l’accident.

Ainsi, la Cour conclut que les préjudices corporels de Godbout et Gargantiel proviennent d’une série d’évènements liés de façon plausible, logique et suffisamment étroite à l’accident automobile. Le pourvoi est rejeté.

27 Juin, 17

 

 

Articles reliés