Un testament léguant les biens meubles opère-t-il une révocation de bénéficiaires dans une police d’assurance-vie? – Critère de l’intention évidente du testateur
Lahaye c. Succession de Perron, 2017 QCCQ 1574
Mme Micheline Lahaye (« Lahaye ») poursuit M. Pierre Garant (« Garant ») en sa qualité de liquidateur de la succession de son époux, M. Jean-Roch Perron (« Perron »), pour lui réclamer le produit de ses polices d’assurance-vie d’une somme de 12 234,73 $.
POUR EN SAVOIR PLUS
Les faits
Bien que mariés au jour du décès, Lahaye et Perron ne faisaient plus vie commune depuis 2001. C’est plutôt Mme Ysabelle Paquet (« Paquet ») qui était la conjointe de fait de Perron.
Le 27 juillet 2012, Perron signe un testament dans lequel il lègue à Lahaye « tous mes effets personnels et les biens meubles qui se trouveront au jour de mon décès dans la résidence sise au […] à Québec que nous possédons conjointement ». Sa nouvelle conjointe, Paquet, est désignée légataire universelle résiduaire.
Le 4 août 2012, Perron décède.
Les polices d’assurance-vie indiquent les « ayants droit » de Perron comme bénéficiaires.
Lahaye soutient que le produit des polices d’assurance-vie lui est dû puisque le testament lui lègue les « biens meubles » de la résidence à Québec. En ce sens, elle invoque que les polices en format papier se trouvaient dans la résidence au moment du décès pour tenter de les qualifier de « biens meubles » visés par le legs.
Analyse et décision de la Cour
La Cour débute en analysant la désignation des bénéficiaires dans les polices d’assurance-vie. L’utilisation des termes « ayants droit » à titre de bénéficiaire doit s’interpréter comme désignant la succession de Perron.
Ceci étant, il faut déterminer si le legs des biens meubles fait à Lahaye a eu pour effet de révoquer la désignation des bénéficiaires. La Cour explique qu’il faut déterminer l’intention du testateur et que celle-ci doit être « évidente ». Il ne sera pas suffisant de prouver qu’il est possible, probable ou même très probable que le testateur voulait révoquer ses bénéficiaires.
La Cour conclut qu’il est loin d’être évident que Perron voulait révoquer ses bénéficiaires. D’abord, Perron ne mentionne pas spécifiquement ses polices d’assurance-vie dans le testament. De plus, une police d’assurance-vie est un bien incorporel. Il est donc illogique de prétendre qu’en léguant ses biens dans la résidence de Québec, un lieu physique, Perron avait l’intention d’affecter ses polices d’assurance-vie.
Ainsi, la Cour conclut que Lahaye n’est ni bénéficiaire, ni légataire du produit des assurances-vie de Perron. La demande est rejetée.